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  • Rue du port un jour de marché à Pont-Aven
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Daniel Lomenech

Daniel LOMENECH, résistant de la première heure

Non ! non à la capitulation, non au déshonneur, non à la lâcheté ! En ce mois de juin 1940, il faut une force de caractère peu commune pour dire non. De cette force de caractère, Daniel Lomenech n’en manque pas.

Daniel LOMENECH et les "Deux Anges"

Un incendie détruit l’hôtel en 1925 et M.Lomenech décide alors de créer une conserverie de légumes. Son affaire prospère, étend son activité aux conserves de poissons et en 1938 emploie 4 permanents et 80 saisonniers.

A 7 ans, le jeune Daniel devient interne à St-Yves à Quimper. Toute sa scolarité, il montrera un caractère rebelle et indépendant, ce qui lui vaudra de changer d’établissement plus souvent que la normale. Il est élève, notamment, à Saint-Louis à Lorient et à Saint-Pol de Léon. Il passe néanmoins la première partie du baccalauréat mais la guerre est déclarée. Trop jeune pour être mobilisé, il aide son père à l’usine.

Quand survient la défaite, il entend parler d’un « général, à Londres, qui propose de continuer la lutte ». A partir de ce moment, il n’a de cesse de rejoindre l’Angleterre. Ses parents, bien qu’inquiets, ne s’opposent pas à ses projets. Après des tentatives infructueuses en juillet et août 1940, Daniel, avec ses quatre autres compagnons, trouve un thonier, Le Lusitania, qui va, moyennant paiement de 12000 francs, leur faire traverser la Manche. Pour financer ce voyage, Daniel revendra des cigarettes laissées à Ploujean par les troupes anglaises en retraite. Arrivé en Angleterre, il est soumis, comme tous les français dans son cas, à des interrogatoires et contrôles rigoureux de la part des autorités militaires anglaises. Recruté par les FFL, il est intégré dans la section de renseignement MI6 des forces armées britanniques.

Immédiatement, des missions de renseignement en Bretagne lui sont confiées. En mars 1941, lors d’une de ces missions, il participe à la mise en place du réseau Johnny, réseau auquel appartiennent vite ses parents. Pour ces missions, le transport s’effectue à bord de sous-marins, comme le Sea Lion, qui débarquent et les rembarquent près des Glénan. Missions dangereuses où l’on risque sa vie à tout instant mais dont Daniel s’acquittera avec brio. Au retour d’une mission, en juillet 1941, il suggère à ses supérieurs d’utiliser des bateaux de pêche armés. C’est ainsi qu’il devient le commandant d’une de ces unités, le chalutier concarnois Le Dinan, rebaptisé MFV 2023. Il reçoit la Distinguished Services Cross en octobre 1942 et la Croix de Guerre avec Palmes.

En août 1943, le danger de ses missions devient trop grand : les Allemands l’ont identifié et le recherchent. A sa demande, il est envoyé en formation à l’Ecole Navale anglaise de Dartmouth et sur le sous-marin Elfin. Il servira ensuite à bord de sous-marins tel le Tiptoe et le Trusty et finira la guerre comme lieutenant de vaisseau, commandant en second du sous-marin Safari.

A la fin de la guerre, il aurait pu poursuivre une carrière d’officier de marine dans la Royal Navy mais choisit de rentrer en France.

De retour à Pont-Aven, il apprend avec douleur et tristesse le sort cruel que les Allemands ont infligé à sa famille. Fin 1941, un traître, infiltré dans le réseau Johnny, provoque l’arrestation de treize résistants, dont ses parents, sa sœur et l’employée de maison. Après des incarcérations à Angers, Fresnes et la Santé, ses parents sont envoyés en camps de concentration. Son père mourra en juillet 1942 à la forteresse d’Hinzert. Sa mère sera déportée à Ravensbruck puis à Bergen Belsen où elle mourra au moment de la libération du camp. Quant à sa sœur, relachée en 1942, elle mourra des suites de son incarcération, en 1946.

Plaque commémorative à la cale des "deux Anges"

Une plaque commémorative de cet événement historique est placée à la cale d’où partit le bateau "Les Deux Anges". La cale porte d’ailleurs encore ce nom :

Les plans du mur de l’Atlantique de Cherbourg à Honfleur quittèrent Pont-Aven pour rallier l’Angleterre.

C’est d’un quai du port de Pont-Aven qu’à l’aube du 17 juin 1942, embarqués sur la barque de pêche « Les Deux Anges », son patron Louis Yéquel et son équipe de marins pêcheurs prirent la mer pour permettre au colonel Gilbert Renault dit « Rémy », créateur et chef du réseau de renseignement de la France libre « Confrérie Notre Dame » (CND), à son épouse, à leurs quatre enfants et à Alain de Beaufort, dit « Léger », d’échapper à l’ennemi et de rallier l’Angleterre.

Cette opération « Marie Louise » fût organisée du côté français par Alphonse Tanguy, dit « Alex », et du côté britannique par les Services Spéciaux, conseillés par Daniel Lomenech de Pont-Aven, Français libre de la première heure qui avait des connaissances remarquables des côtes bretonnes.

En dépit de tous les périls, « Marie Louise » fût un succès total. Le chalutier « N51 » (« Le Dinan »), armé par la « Royal Navy » commandé par Steven Mackenzie, assisté de Daniel Lomenech et Richard Townsend, assura le relais avec « Les Deux Anges » au large des Iles Glénan, et le 19 juin 1942 rentra aux Iles Sorlingues avec ses passagers clandestins.

Dans leur maigre bagage se trouvaient les plans du « Mur de l’Atlantique » de Cherbourg à Honfleur, soustraits à l’ennemi par René Duchez à Caen. Ces plans allaient permettre au commandement allié de déterminer son choix des plages du débarquement de juin 1944.

Les « Deux Anges » continua de rendre possibles des liaisons similaires jusqu’à l’automne 1943.

En hommage à l’héroïsme des gens de mer des deux côtés de la Manche.

L’homme d’affaires

Daniel épouse le 27 septembre 1945 Ninon Bergé. Sa femme et lui se connaissent depuis leur jeunesse. Ils auront trois enfants. Commence alors une nouvelle vie pour lui, celle d’un grand chef d’entreprise. Reprenant l’affaire de son père, Daniel va la développer avec talent et dynamisme. En 1951, il crée à Agadir une usine de congélation de thons et de sardines. En 1955, il rachète une fabrique de glace à La Trinité et la transforme en une unité de congélation et de stockage à basse température. Ceci lui permet de faire fonctionner son usine de Pont-Aven toute l’année et non plus seulement l’été. En 1958, il crée à Pont-Aven une usine de fabrication de boîtes métalliques. En parallèle à ses activités dans la conserverie, Daniel Lomenech prend des parts dans quatre chalutiers de 45 mètres : Le Vengeur, Le Vainqueur, Le Vétéran et Le Victorieux. V comme Victory day…

En 1960, il prend le contrôle d’une usine du Lion Noir à Lyon, fabriquant des boîtes métalliques. Son groupe, fort de 700 employés, devient en 1964 la société Rhône-Bretagne au capital de 7 millions de francs.

Au cours de ces années, il apprend aussi à piloter à Pluguffan et aménage un terrain d’aviation à Port-Manech. Il possèdera un bimoteur, qu’il utilisera pour ses déplacements d’homme d’affaires moderne.

En 1965, entrevoyant avec lucidité l’avenir incertain des activités de conserverie, Daniel Lomenech vend Rhône-Bretagne à Carnaud et Ferambal. En 1968, l’entreprise d’Agadir est nationalisée par le gouvernement marocain. Les nouveaux propriétaires, Carnaud et Ferambal, se verront obligés de déposer le bilan de Rhône-Bretagne en 1972.

Après la vente de Rhône-Bretagne, Daniel change son rythme de vie et effectue des croisières sur un très beau bateau, le Firebird, en Atlantique notamment. Avec trois associés, il a aussi crée une exploitation de culture d’asperges et de haricots verts en Estramadure, exploitation qu’il revendra ensuite.

Il est aussi actionnaire de Couesnon, fabricant de clairons et trompettes à Château Thierry. Lorsqu’un des associés meurt subitement, il prend la relève par devoir et dirigera cette entreprise pendant cinq ans, jusqu’en 1980.

A partir de 1980, il va de nouveau se consacrer à des activités plus personnelles : voile, aviation et collection de vieilles automobiles.

Il devra subir une importante opération du cœur en 1989 et consacrera dès lors son temps à sa famille et à sa collection de voitures. A sa mort, le 1er octobre 1996, sa collection est forte de 25 unités. Il s’occupa beaucoup, entre autres, de la restauration d’une Bugatti type 30. Sa famille s’est engagée à mener cette restauration à son terme.

Homme de caractère, homme de passion, Daniel Lomenech aura apporté beaucoup à son pays en général et à Pont-Aven en particulier. Que ce soit dans sa vie de combattant de la liberté ou dans son activité de créateur et chef d’entreprise, il aura toujours fait preuve de goût du risque, de dynamisme et de courage.

Texte écrit par Jean-Claude Rivet pour le bulletin trimestriel municipal de 1996.

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